C’est un buzzword depuis 15 ans, mais tout le monde ne l’a pas appliqué avec bon sens… Cette semaine, on nomme : la méthode agile, mode de travail née au sein des équipes produits des entreprises du web et des start-up dans les années 2000 aux Etats-Unis… Avant de se répandre au sein d'entreprises traditionnelles (grandes banques, acteurs de l'industrie automobile ou aéronautique, etc).
Elle date, l’époque où on parler de ces “early adopters” de l’agilité. Maintenant qu’on a du recul, retour sur cette méthode buzzword qui - spoiler - n’a pas toujours été appliqué avec bon sens !
Retour sur une méthode qui facilite la coopération, l’engagement et la création de valeur :
Intégrer les imprévus, privilégier le dialogue, minimiser le travail inutile. Voilà quelques-uns des principes de la méthode Agile, défendus par le manifeste agile rédigé en 2001 par 17 entrepreneurs mondiaux.
La méthode agile se caractérise par une démarche structurée, rigoureuse et ritualisée. Le manager y devient un « product owner » et supervise l'avancement du projet. Chaque projet a son “coach agile”, sorte de chef d'orchestre qui définit la façon de travailler de son équipe et accompagne ses membres. L'objectif ? Planifier à long terme mais agir à court terme, en découpant un projet en différentes étapes (des « sprints ») de 2 à 4 semaines au cours desquelles un travail spécifique (issu du « backlog ») sera accompli. Ah oui, la méthode agile, c’est tout un vocabulaire !
Avant d'être une méthode buzzword servie à toutes les sauces, l'agile a des bénéfices non négligeables :
La méthode agile a l'avantage de faire coopérer plus efficacement les équipes et donc de favoriser l’énergie et l’intelligence du collectif. Grâce aux itérations proposées par ce mode de travail, fini les longs mois de tunnels où chacun travaille dans son coin pour finalement se rendre compte que tout le monde était à côté de la plaque et qu’il faut tout revoir. Fini l’effet tunnel et les semaines de travail inutiles ! Place au dynamisme et la fierté de voir les choses sortir concrètement et rapidement. La plupart des entreprises leaders de leur secteur ont construit leurs offres et leurs produits de manière itérative.
L’organisation en sprints permettant un réajustement régulier des priorités des uns et des autres, cela a permis de lisser la charge de travail dans le temps, ce qui est plus motivant pour tout le monde.
Dans la mode agile, chacun est mis sur un pied d’égalité. Les échanges et le partage de connaissance sont encouragés, ce qui permet à chacun de monter en compétences beaucoup plus vite. Ce qui tombe à pic, quand on sait que de nombreux salariés et managers français aspirent à “plus d'autonomie, plus de coopération et de responsabilisation”, comme le rappelle une étude Ipsos-BCG.
Oui, MAIS : la méthode agile est une méthode, pas une réponse à tous les problèmes !
Pour autant, la méthode agile n’est pas une baguette magique. Comme toute méthodologie, elle doit être pensée pour, avec et en équipe. Ci-dessous, nos recommandations pour éviter de tomber dans les erreurs types autour du déploiement de ce modèle.
Ne pas confondre "agile" et "chaotique". Qui dit méthode dit rigueur et structure. Or, de par son nom peut-être, la méthode agile est souvent confondue avec une réponse un peu facile "on est agile" - aka, "on ne sait pas trop où on va mais on s'adaptera". Alors qu'au contraire, pour itérer et fonctionner de manière optimale la méthode a besoin de beaucoup de rigueur, se repose sur des rituels très codifiés (coucou le kanban, stand-up meeting et autres).
Dans la même veine, ne pas confondre agilité profonde et agilité cosmétique : ce n'est pas parce que vous avez un board kanban couvert de post-it dans un bureau que vous êtes "agile". L'agilité est très codifiée, ce qui a le mérite de simplifier son adoption, mais on a parfois tendance à appliquer bêtement les méthodes, sans voir que les stand-ups meetings du lundi matin font en réalité perdre un temps fabuleux à toute l'équipe et que le fonctionnement en squad, tribu et autres ajoute plus de confusion que de clarté. La conduite du changement et la compréhension initiale du besoin - "pourquoi passons-nous à l'agile?" sont des éléments majeurs pour éviter ces écueils.
Penser global et s'assurer du soutien indéfectible de la direction générale. Parmi les difficultés majeures rencontrées par les entreprises s'étant essayées à l'agile au cours des dernières années : faire de l'agile dans un monde non agile. En d'autres termes, faire passer l’équipe informatique en agile sans inclure tout l’écosystème dans ce mode de fonctionnement garantie des problèmes de mise en œuvre. Si la méthode agile ne peut pas s'appliquer à tous les projets, il faut tout de même prendre en compte les interactions avec les autres équipes et trouver un mode de fonctionnement qui permette l'agile, sans forcer la main au voisin. Clairement plus facile à dire qu'à faire mais un peu de bon sens et de dialogue dans ce monde de systèmes ne fait pas de mal (pensez workshops et stakeholders management, si vous passez à l'agile, impliquez vos parties prenantes et dialoguez plutôt qu'imposez)
Ne pas céder à la tendance et comprendre que le mode agile ne peut s’appliquer à tous les projets, notamment ceux qui ont des impératifs de budget, de délai très court et de sécurité - appliquer le mode agile sur des projets industriels avec des enjeux de sécurité énormes, c’est courir à la catastrophe ! Et parfois, passer au mode agile est une fausse solution. Alors quand on accompagne des clients sur l’amélioration de leur performance interne, il est essentiel de passer par une phase de compréhension et/ou d'audit, histoire de ne pas plaquer des méthodes toutes faites à un problème qui a des causes variables.
Une dérive possible : cette organisation en sprints, très drivée sur les délais, peut mettre une pression supplémentaire aux salariés et créer des zones de stress quand le cadre fixé n’est pas raisonnable. D’où l’importance de bien définir au départ la complexité des tâches, la charge de travail induite et les ressources disponibles. D’où l’importance aussi, de prévoir des “sprints” de respiration dédiés à de la documentation et de la prise de recul. Il est essentiel, aussi, de prévoir un mix entre des sprints dédiés à du développement et d’autres dédiés à la correction. Dans la même veine, gare à l’overdose de meetings & process qui ont vite fait d’épuiser tout le monde.
Travailler sur le mindset agile. Avant la méthode, avant les outils, l’agilité est… un état d’esprit et une posture ! Kézako ? Eh bien, la capacité à s’adapter à l’imprévu, à être force de proposition, à oser faire différemment, et peut-être surtout à se mettre dans la peau du client final. Souplesse, ouverture, écoute en sont les maîtres mots.
Penser organisation agile. L'agilité n'est pas une simple méthode de développement réservée à la DSI, c’est la capacité d’une organisation à créer de la valeur et à satisfaire continuellement le client final, tout en s’adaptant aux changements de son environnement. Cela constitue une évolution voire une transformation de la culture de l’organisation basée sur la collaboration, la créativité, la responsabilisation des équipes, une vision clairement définie et des équipes autonomes, et la confiance pour favoriser la prise de risque et l’initiative.
Enfin, rappelons qu'il y a eu beaucoup de marketing autour du mode agile, qui est devenu un véritable buzzword dans les 15 dernières années. Rappelons que certains principes de l’agile existaient déjà dans d’autres méthodes : on retrouve la notion d'amélioration continue dans la méthode Kaizen, ou encore la centricité client dans la philosophie "Total Quality Management" qui date de l'après-guerre... Bref, un joli rebranding de concepts pleins de bon sens, à appliquer avec une saine distance critique.
Vous l’aurez compris, chez Sens Futur on aime bien prendre du recul et se détacher des buzzwords, histoire ne pas appliquer bêtement les tendances. Mais loin de nous l’idée de taper sur une méthodologie qui a beaucoup apporté en termes de collaboration, d’efficacité et de création de valeur pour le client. Mais voilà : encore faut-il l’utiliser avec bon sens !
Rien de mieux pour clôturer cet article que les mots d’Ander Ivarsson, coach agile et co-auteur du livre blanc de Spotify 3 :
“Cela m’inquiète lorsque les gens regardent ce que l’on fait et pensent que c’est un framework qu’ils peuvent juste copier et implémenter. … On essaie vraiment de souligner le fait que l’on a des problèmes également. Ce n’est pas comme si tout marchait bien et que toutes nos squads étaient fantastiques.”
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